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Eucharistie

Quel est le sens de l’Adoration ?

Eglise de Jésus-Christ

L’adoration eucharistique, contre-pied à la société du bruit

Alors que 1 800 participants se retrouvent cette semaine à un congrès à Paray-le-Monial, on constate un engouement des catholiques pour les sessions proposant l’adoration eucharistique

 

Adoration du Saint Sacrement lors de la session des 25-35 ans, le 13 juillet à Paray-le-Monial (Corinne MERCIER/CIRIC).


« Adorer pour transformer le monde : notre espérance. » Voilà le thème sur lequel les 1800 participants au cinquième congrès pour l’adoration de Paray-le-Monial, organisé par la communauté de l’Emmanuel du 17 au 22 juillet, sont invités à méditer. Il s’agit, explique le P. Antoine Bergeret, chapelain aux sanctuaires de Paray-le-Monial, de « découvrir l’adoration de manière personnelle ».


Pour les catholiques, l’adoration consiste à prier devant le Saint Sacrement, c’est-à-dire l’hostie consacrée, dans laquelle les fidèles voient la présence du corps du Christ sous l’apparence du pain eucharistique.


Inauguré en 2006, le congrès pour l’adoration avait alors accueilli 800 personnes. Quatre ans plus tard, il en attend donc mille de plus, « le désir d’adoration se manifestant de plus en plus dans l’Église », constate Jean-Luc Moens, responsable de l’organisation des quatre premiers congrès : il se souvient que dans les années 1970, les ostensoirs étaient souvent « perdus au fond des placards, couverts de poussière ».

Une forme de relation plus personnelle avec Dieu

*       Les communautés nouvelles ont assurément contribué à la redécouverte de l’adoration depuis une trentaine d’années. Les textes de Jean-Paul II et Benoît XVI ont également joué un rôle décisif dans le développement d’une « culture d’adoration eucharistique », comme l’affirme le P. Florian Racine, curé à Sanary-sur-Mer et responsable de l’association cléricale des Missionnaires du Saint-Sacrement.

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Fondée en 2007, cette association a pour mission de promouvoir l’adoration perpétuelle dans les paroisses. Une trentaine de « paroisses adoratrices » existent ainsi en France. L’adoration perpétuelle y est assurée par l’engagement de chaque paroissien à venir prier une heure par semaine devant le Saint Sacrement. Pour le P. Racine, l’adoration répond à une « soif toujours plus grande d’intériorité ». Il rappelle cependant qu’il ne s’agit pas d’une « piété personnelle » ou d’une « dévotion privée » mais d’un service spirituel communautaire, qui ne conduit pas à fuir la réalité mais à s’y engager.

        
Dans la société actuelle, l’adoration témoigne sans doute du désir croissant d’une forme de relation plus directe et plus personnelle avec Dieu. Pour Jean-Luc Moens, cette sensibilité nouvelle à l’adoration est à mettre en relation avec une « société bruyante, où tout bouge très vite ». L’adoration rencontre ainsi une aspiration profonde à « faire silence » et à « se mettre à l’écoute de Dieu ».

Retrouver une «attitude de foi profonde»

         « Le renouveau de l’adoration est symptomatique de l’époque dans laquelle nous vivons », affirme également Michel Raynaud. Pour l’actuel responsable de l’organisation du congrès de Paray-le-Monial, l’adoration « libère », dans la mesure où on cesse de se voir à travers le regard de l’autre, pour se placer sous le regard de Dieu.

Renouvelée depuis plusieurs années, l’adoration eucharistique n’en est pas moins inscrite dans la tradition de l’Église. « Louer devant le Saint Sacrement est une pratique ancienne, vécue dans certaines communautés monastiques, à des moments particuliers du calendrier liturgique », rappelle Bruno Abart, directeur des sanctuaires à Paray-le-Monial.


Aujourd’hui, on redécouvre donc ce « trésor » de l’Église, ce qui amène à faire preuve de « créativité, tout en intégrant la tradition ». À la basilique du Sacré-Cœur de Montmartre, c’est depuis 125 ans que l’adoration eucharistique est continue… En cette année jubilaire, le P. Jean Laverton, recteur de la basilique parisienne, insiste sur la « grâce » de cette adoration perpétuelle « au cœur de la ville », dans un sanctuaire qui accueille plus de 10 millions de visiteurs par an. Face à l’activisme ambiant, l’adoration est motivée par la volonté de retrouver une « attitude de foi profonde », ajoute-t-il.

Prendre conscience que Dieu n’est pas «au-dessus de nous»

         Pour le P. Laverton, le fait d’être moins nombreux dans l’Église incite à privilégier ces moments où on a le sentiment de « vivre l’essentiel ». Il estime également que la redécouverte de l’adoration entre dans une prise en considération renouvelée de l’« aspect sensible » de la foi, qui avait pu être en partie « mis de côté ». À la basilique, les Bénédictines du Sacré-Cœur de Montmartre observent une « diversité absolument extraordinaire » parmi les personnes qu’elles accueillent pour les nuits d’adoration.

        
Le renouveau de l’adoration est particulièrement sensible chez les jeunes. « Avoir le regard sans cesse tourné vers le Seigneur », c’est l’objectif des week-ends « 48 heures pour Jésus » proposés par Jeunesse 2000 (1). Tout au long de ces week-ends, qui rassemblent en moyenne 200 personnes, le Saint Sacrement est exposé en permanence.


Pour Damien Coutansais, 30 ans, président de Jeunesse 2000 en France, la présence réelle du Christ dans le Saint Sacrement « porte » aussi bien les participants que les intervenants, alors que Floriane Louvet, 22 ans, « étudiante référente » pour la région Sud-Est, met en avant le « besoin de voir et de sentir » la présence de Dieu. Finalement, note encore Steven Durand, 23 ans, du même mouvement, l’adoration eucharistique fait prendre conscience que Dieu n’est pas « au-dessus de nous » mais « parmi nous ».


Céline TRESCASES

La Croix Mardi 20 juillet 2010


(1) Lancé en 1990 en Grande-Bretagne, Jeunesse 2000 est un mouvement international implanté en France depuis 2002 et actuellement présent dans une dizaine de villes.