« Les salésiens sont appelés à servir les jeunes d’aujourd’hui »


Des salésiens de Belgique et de France se sont réunis cette semaine près d’Angers pour une retraite. Leur supérieur général, le Mexicain Pascual Chavez, détaille les « nouvelles pauvretés » qui touchent la jeunesse

 

ENTRETIEN >>>> P. Pascual Chavez, recteur majeur des salésiens, président de l’Union des supérieurs généraux (USG)


En quoi la spiritualité et l’ex­périence de Don Bosco sont-­elles toujours actuelles ?


P. PASCUAL CHAVEZ :
La spiritua­lité de Don Bosco est inséparable de son expérience pédagogique : si elle est toujours neuve, c’est parce qu’elle place le jeune au centre du système éducatif. Pour le fondateur des salésiens, les jeunes ne sont pas des « objets à éduquer », mais les acteurs de leur propre éducation. Or, ils y sont particulièrement sen­sibles, aujourd’hui comme hier ! À cela s’ajoute un esprit de bonté et de famille: tous se sentent accueillis comme ils sont, là où ils sont. Enfin, cette proposition éducative concerne tous les aspects de leur vie – aussi bien leur formation scolaire que personnelle –, afin de leur don­ner une vision positive d’eux-mê­mes et de la réalité qui les entoure.


L’annonce de l’Évangile est dans «l’ADN» des salésiens: comment faire, dans une société qui craint le prosélytisme ?


Notre ADN, c’est avant tout cette passion pour les jeunes, cette ardeur apostolique à leur faire du bien. C’est ce que nous vivons dans nos écoles, nos universités, nos centres d’accueil… Nous ne voulons pas faire de prosélytisme, mais partager la joie d’avoir décou­vert le Christ comme source de la plénitude à laquelle nous aspirons tous. C’est vrai, cette transmission est plus difficile que par le passé, le christianisme étant moins pré­sent dans la société actuelle. Mais notre message est plus signifiant aujourd’hui, car précisément il donne à voir l’identité chrétienne dans un monde pluraliste.


Votre chapitre général, tenu à Rome du 3 mars au 12 avril, a insisté sur la nécessité d’ « identifier les nou­velles pauvretés», les «nouveaux fronts d’action» : quels sont-ils?


Ce sont toutes ces situations qui compromettent l’avenir des jeunes, comme la pauvreté affective : trop de jeunes n’ont plus de parents et vi­vent une grande solitude. Il y a aussi la pauvreté culturelle et l’absence de repères solides pour s’insérer. Cela traduit une pauvreté éthique et des difficultés à se situer dans le monde, beaucoup ne sachant plus distinguer le bien du mal.
Enfin, la pauvreté spirituelle est évidente : certains jeunes évoluent dans un monde sans transcen­dance, qui plombe les ailes de l’es­pérance. Et sans elle, pas d’avenir : ils se contentent de vivre l’instant présent, sans être ancrés dans le passé ni tournés vers l’avenir. Ce qui manque aux jeunes d’ici, par rapport à ceux d’Amérique latine, d’Asie ou d’Afrique, c’est le sens de la vie : ils sont repus de choses, mais affamés d’amour. Mais il est un élé­ment commun à tous les jeunes du monde: en règle générale, ils sont bons et désirent être heureux. Dès lors, le secret de l’éducateur est de gagner leur confiance afin de libérer toute l’énergie qui se trouve dans leur cœur.

Vous voulez aussi vous « concentrer sur les priorités de la mission plus que sur la gestion des œuvres, sur les présences significatives plus que sur tous les fronts » . Manquez-vous de vocations ?


Ce qui nous importe n’est pas tant le maintien des structures que l’éducation des jeunes: nous essayons de nous engager là où nous pouvons encore être signi­fiants. Dans un contexte de baisse des vocations, nous ne pouvons plus occuper tous les fronts d’action. Sur un plan mondial, avec 500 novices et 270 ordinations chaque année, elles se portent bien, même si elles baissent en Europe. Convaincu du service que les salésiens sont en­core appelés à rendre aux jeunes d’aujourd’hui, notre chapitre a décidé un «projet Europe» visant à raviver la présence salésienne sur le Vieux Continent. Nous nous réu­nirons à Rome fin novembre pour en décider les modalités.

 

Vous êtes très investis en Amérique du Sud. Quels y sont les enjeux édu­catifs et spirituels ?

 

Avec 1800 salésiens, nous y sommes la présence de religieux la plus significative : nous devons continuer à soigner la qualité de nos écoles, développer l’évangélisation dans nos paroisses, affermir notre travail auprès des enfants de la rue… L’autre priorité est d’in­culturer le christianisme auprès des populations marginalisées. Certes, l’évangélisation y est plus aisée qu’en Europe: le niveau de vie est moins élevé, et ces pays possèdent un «humus» religieux très fort. De plus, leurs populations sont jeunes.


On dit les salésiens très influents au Vatican. Est-ce une réalité ?


Nous avons toujours cherché à tra­vailler en lien étroit avec l’Église et le pape. Avant le cardinal Tarcisio Bertone (NDLR: actuel secrétaire d’État de Benoît XVI), plusieurs salésiens avaient déjà exercé de hautes fonctions au Vatican, mais c’est la première fois que l’un de nous reçoit une telle responsabi­lité. Il s’agit d’un service de notre congrégation pour l’Église, et c’est aussi une marque d’estime du pape envers les salésiens.

 
RECUEILLI PAR

FRANÇOIS-XAVIER MAIGRE

 




Le P. Pascual Chavez, recteur majeur des salésiens, rappelle l’aspiration de sa congrégation à éduquer la jeunesse.
D. R.

 

 

L’éducation reste la priorité des fils de Don Bosco
15 000 salésiens accueillent et forment les jeunes dans le monde

Priorité aux enfants défavorisés


>> Saint Jean Bosco (1815-1888), dit «Don Bosco », admirateur de saint François de Sa­les, a voué sa vie à l’éducation des enfants de milieux défavorisés. Il a fondé la congrégation de Saint-François-de-Sales (salésiens de Don Bosco) et, avec sainte Marie-Dominique Maz­zarello, celle des Filles de Marie-Auxiliatrice, dites « salésiennes ». En Europe, une nouvelle province francophone réunissant la France et le Sud de la Belgique comptent 260 religieux. Dans le monde, on dénombre plus de 15 000 salésiens, soit le plus nombreux institut masculin de vie consacrée après les jésuites.

« Les jeunes sont pris tels qu’ils sont »


>> En France, salésiens et salésiennes ont la charge de sept paroisses et la responsabilité d’une quarantaine d’établissements scolaires accueillant près de 20000 jeunes. Les maisons d’action sociale proposent des formations aux métiers de l’hôtellerie, de la prévention et de la sécurité ainsi qu’au secteur tertiaire. Le foyer Père-Robert, situé à Épron (Calvados), accueille des jeunes en difficulté, donnant l’occasion de trouver une école ou un emploi à ceux qui ne sont pas scolarisés sur place.
«Dans nos écoles, les jeunes sont pris tels qu’ils sont, chrétiens ou pas,
insiste le P. Joseph Enger, provincial de France . Toute œuvre salésienne doit d’abord être une maison qui accueille, qui forme à la vie, et aussi une Église qui célèbre et un lieu de joie. »
À Argenteuil, le Valdocco, association fondée par le salésien Jean-Marie Petitclerc, est devenu un modèle de lutte contre l’exclusion, alors que, près de Lyon, l’Institut Saint-Laurent d’Écully dispense des formations aux professions sociales.
Au sein du réseau Don Bosco, les laïcs formés dans l’esprit salésien prennent le relais des reli­gieux, moins nombreux.

DENIS FEIGNON

La Croix du Vendredi 22 Août 2008

 

 

Nouvelle province salésienne:

France&Belgique-sud

Près de 70 confrères, 15 Filles de Marie Auxiliatrice, 12 salésiens coopérateurs, quelques anciens et amis de Don Bosco, se sont rassemblés à Pouillé, vers Angers, pour vivre une retraite prêchée par le Recteur Majeur. Le Père Pascual Chavez a repris avec eux les thèmes du Chapitre Général 26. Il s’est adressé aux 110 participants comme un frère parmi ses frères, et un Père pour la Famille. 

Il a adressé aux retraitants un message fort et interpellant, qui les a invités à affronter les nouveaux défis pour l’éducation des jeunes et la proposition de la foi dans cette partie de l’Europe très sécularisée. Il a répondu aux questions sur l’actualité et l’avenir du charisme salésien en Europe de l’Ouest et dans le monde. (Il a également rencontré un journaliste de La Croix)

Cette retraite a été voulue pour vivre en Famille salésienne l’union des Provinces de France et de Belgique Sud. Ces deux Provinces, qui partagent la même langue, collaborent depuis longtemps sur de nombreux thèmes : la formation initiale, l’animation des communautés, la communication sociale… Elles ont décidé de s’orienter résolument vers une nouvelle et unique Province, sans passer par l’étape de la délégation. Le nouveau Conseil Provincial, autour du Père Joseph Enger, Provincial, aura pour tâche de porter en avant cette identité provinciale par des rencontres, des échanges et des projets communs.

En fin de retraite, le 23 août, a été célébrée l’union des Provinces de France et de Belgique Sud. Le Recteur Majeur a installé dans ses fonctions le Provincial de la nouvelle Province et a fortement invité chacun à vivre pleinement les objectifs du CG 26, notamment en allant à la rencontre des nouvelles pauvretés des jeunes. Un moment très fort a été le renouvellement des vœux des salésiens présents, venant des deux ex-Provinces. 

Cette semaine a été un temps intense de renforcement de l’identité salésienne. Chaque participant, religieux ou laïc, est reparti avec la mission de contribuer, là où il se trouve, à « donner plus à ceux qui ont reçu moins » ; à oser appeler d’autres personnes à s’engager dans cette mission ; à aller de l’avant avec audace apostolique, avec le sourire, le cœur et l’esprit de Don Bosco.

Jean-Noël CHARMOILLE

salesien.com